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Il n’y a guère que contre le silence que je ne puisse me battre. L’inertie sereine d’un monde où rien ne frémit, où les souffles sont imperceptibles. Parce que j’aurais beau hurler et scander toutes sortes de prières imbéciles pour entendre l’écho, je n’entendrai rien d’autre que le son lacéré de ma propre inutilité. Et je n’aurais sans doute plus qu’à m’allonger les poings desserrés contre l’immobilité et à attendre, moi aussi, que le temps passe, simplement.
Bienheureux soit le monde dans lequel nous existons, puisqu’il y a encore des gens qui se retournent dans la rue sur les cris insensés de quelques fous qui n’ont peur de rien. Rien n’est perdu quand une voix nous appelle encore. Tant que quelques accords nous font encore battre du pied, et que nos ventres se nouent devant l’émotion.
Alors tu peux parler, gamine, tu peux crier, et même pleurer sur mon épaule. Je ferai sans doute la même chose demain, quand j’aurais les oreilles pleines et le cœur qui déborde. Se remplir et se déverser, pour n’avoir jamais la sensation d’être vide. J’ai bien trop peur que quelqu’un finisse par faire péter un maillon de cette chaîne et de me retrouver face au silence.
Pluie parfumée qui gémit à mes carreaux, le temps s’est arrêté. Le prince souffle, souffle sur les cartes de l’autre monde qui ne s’éteint pas. Je l’aide à exhaler les miettes d’un ailleurs oublié en pressant ses côtes. C’est une pichenette sur le béton, ca n’a pas de sens. Pas plus que les pas serratiques d’un enfant paumé sur un fil de soie. Un tropisme chaloupé avec de la lumière dans les yeux. Mais c’est là, et il faut bien le faire vivre, puisque le prince le psalmodie. Alors on blêmit nos poumons pour faire plier le souvenir. On y croit, avec une ferveur misologique rare, en se tenant les pouces, en se frottant les joues.
Le vent se lève et emporte avec lui la magie, la lumière et la carte. Le temps reprend, fidèle à son habitude, sans un regard pour le prince qui s’endort, dans une tendre apostasie imposée. Je rallume les bougies, et je trace sur ses courbes les psaumes d’une émotion furtive, jusqu’à m’étrangler de chair et de sillons. Je redessine la carte, je recrée le moment, j’efface les idées peccamineuses qui me viennent pour plonger à nouveau dans les songes thaumaturges.
La pluie parfumée perce les
carreaux.
J’ai toujours peur du vide, tu sais. De l’ennui et des murs trop blancs. Ca me surprend la nuit, quand t’es pas là, quand le seul sentiment auquel me raccrocher, c’est le manque. J’avale des pavés lumineux pour oublier, mais ça revient toujours, en sursauts indigestes, des crampes à l’être et à l’avoir. Ces moments où je ne conjugue mon Verbe qu’à l’impératif, et où rien ne m’obéit, surtout pas moi-même. Calfeutrée dans mes sourires, je dessine des faux semblants où il fait moins froid.
Alors c’est venu comme ça, comme un souffle, quand j’ai ouvert la porte. J’avais ouvert la fenêtre, et il y avait ce bruit, cette ville tellement pleine que je n’ai jamais su par où la mordre. Un bijou qu’on ne m’offrira jamais.
Et lui, il venait de là bas, y avait quelque chose de brillant dans ses yeux, alors je devais l’éteindre. J’ai lâché la serviette qui me couvrait et j’ai approché mes mains de sa tête. Et j’ai appuyé fort, fort, sur yeux. Il a pas eu le temps de hurler, je l’ai tiré sur moi et fermé la porte, j’ai pressé mon corps contre le sien. Il se tenait la tête et j’existais déjà plus pour lui. J’étais que de passage dans sa vie, un quart de seconde, et déjà il était retourné à son égocentrisme de sale type qui a connu le paradis. Et qui ne veut pas le partager. Si encore, il m’avait pris par la main pour m’emmener dehors, peut être que j’aurais pas eu peur, peut être que j’aurais suivi. Et je n’aurais pas eu besoin de le punir.
J’ai mis de la musique, pour couvrir ses sanglots. Une belle nocturne en C mineur. Je suis allée chercher le rasoir. Il a tâché de rouge le carrelage trop blanc, et j’avais enfin une couleur à laquelle me raccrocher quand il serait parti et que je serais à nouveau seule. Presque reconnaissante, j’ai arrêté de lui faire mal. J’ai planté mon doigt directement dans son cœur, pour lui montrer, et j’ai désactivé le muscle d’une pichenette.
Et comme après, je ne savais plus quoi faire pour m’occuper en t’attendant, j’ai dessiné des cœurs à l’encre sur sa peau, avec ton nom dedans.
J’ai fermé les fenêtres et j’ai barbouillé le sol des tâches qu’il avait faites. Il s’est même pas défendu, il devait avoir mal aux yeux, sûrement, il a continué longtemps à me fixer l’air mauvais après. Mais j’aimais bien qu’il me regarde.
Pourquoi tu cries, mon amour ?
J’ai fermé ses paupières, tu sais. Et je suis redevenue seule.
Toi, tu connais la ville et ses bruits, mais t’as peur pour moi. Peur que je m’effondre, tu dis, devant le trop grand, le trop plein. Tu m’y emmèneras un jour, tu promets, tu jures.
Je crache sur tes promesses. J’efface les cœurs. Je garde ton nom. Je baisse les stores.
Tu sais bien, mon amour, que je n’aime que toi. Mais j’ai peur du vide. Et je tombe à chaque fois, je trébuche sur les cailloux de solitudes. Il y a du sable dans mes jointures. Chut. Ne dis plus rien. Peint moi des étoiles et des rues, fais taire le blanc qui me nargue, assassine les murs et mes cauchemars. Et le silence qui m’entoure n’a de valeur que si tu es là pour le partager avec moi. Chiffon de ventre et poids des histoires. Tout ce monde dans ma tête, et des discussions un peu plates sur lesquelles je ne m’éternise pas. Les produits de mon imagination n’ont pas grand-chose à raconter.
Viens, allons nous coucher. Je suis épuisée. Ecrase-moi sous ton bras, je vais me lover dans ton odeur.
Demain, il faudra se débarrasser de lui. Il m’ennuie, maintenant.
C’est souvent comme si le temps n’existait
pas. Comme une brèche qui s’ouvre pour que mes souvenirs s’y engouffrent à
émotion perdue, refermer la porte à clef et ne me laisser que l’impression
vague d’un moment qui a existé.
C’est comme ça quand je suis
seule. Une pause malgré moi pour effacer le vécu, n’en garder que des images
incomplètes. Je me demande souvent si tout ça a bien existé, si quelque part,
je ne suis pas folle à lier avec des histoires que mon esprit fait défiler pour
faire passer l’ennui. Une pilule colorée et un peu acide.
Alors pour la fureur au ventre, j’éclabousse
de sang virtuel sur des pages blanches, j’y parsème de l’encre et de la
poussière d’os. Chaque personnage qui meurt est une victoire sur le virtuel. Des
bouteilles vides que je jette à la mer en priant pour qu’elle ne trouve jamais
de destinataires et qu’elles se perdent dans l’écume et les algues. On trouvera
sans doute un jour dans la vase poisseuse le cimetière de mes rages intestines.
Les vagues de lino me lèchent les
pieds. J’inocule des bouffées de songes à mes murs, par tranches maladives, par
euphorie contemplative. Le sac et le ressac des pensées qui tournent en rond et
qui vident la tête, pour ne laisser que le bruit reposant de l’eau qui assassine
la pierre.
La vie me coule entre les doigts,
une folie visqueuse qui s’accroche en rougeurs, une émotion tenace. Est-ce qu’il
existe encore un monde qui ne soit pas surfait et où rien ne serait qu’un
grossier cliché ? Je suis du déjà vu, cette fille qui rêve au bord de l’eau
en se suçant chaque phalange. Je n’existe que trop.
Jure de m’aimer. De n’aimer que moi, toujours. Jure, ou je te crève les yeux. J’aurais pas de remords à cisailler leur jolie prunelle, de les voir s’évanouir à jamais. Je m’en fous, j’ai des photos, s’ils viennent à me manquer. J’aurais juste à me plonger dans des albums pour les retrouver et garder frais leur souvenir. Je sais bien faire, ça vivre dans des souvenirs. Tu le dis souvent.
Ne regarde jamais une autre. Ne regarde que moi. Je veux être la seule qui existe, la seule qui mérite de passer par tes pensées pour se faufiler au plus profond de toi. Glisse moi entre deux organes, bien au chaud, là où tu me sentiras tout le temps, où tu m’oublieras pas. Avale-moi toute entière dans une inspiration.
J’ai peur, tu sais. Qu’un jour tu t’en ailles. Elle aura de longues jambes et un visage à me coller au tapis, des seins à m’écraser au sol. Et tout ce que tu as dit, ca comptera plus, du sable sur du marbre et le souffle de sa jolie bouche qui dissipera le tout.
Construire un mur autour de toi. Dont moi seule aurait la clef de la chatière où m’insinuer. Et t’écorcher si tu cherches à fuir. T’abîmer et te laisser partir, puisque c’est ce que tu veux tellement, mais que tu gardes ma trace quelque part sur ta peau. Te rappeler que tu ne cesseras jamais complètement d’être à moi.
Mais non. Tu sais bien que je ne le ferai jamais. Que c’est du vent, mes colères jalouses et mes envies de sang sur la peinture. Ce sont juste des soubresauts d’acide dans mes tripes et qui m’étouffent quelques fois, qui brisent la chaleur rassurante de tes bras en vomissements épars.
Chut mon amour, ne m’écoute pas. C’est insensé. Viens seulement contre moi et jure de m’aimer toujours.
Alors tu veux du choc ? Tu veux de l’enfance assassinée, de l’adolescence meurtrie ? Je le sais, tu voudrais des soleils éteints et des explosions incestueuses, des claquements de doigts et des insultes. Que je pose des lignes entières sur des vies gâchées, en déchirant des cœurs, en triturant leur tête, en bafouant leur corps, c’est ce que tu as envie de lire, les paquets de misère traînés dans la boue.
Le beau et le clinquant, ça t’intéresse pas, les contes de fées c’est dépassé. On ne rêve plus de mieux, on se délecte du pire. Tu veux que la princesse couche le premier soir et qu’elle choppe le Sida. Que j’inonde mes pages d’alcool, de coke, et que mes héroïnes aient de jolis coquards et des côtes cassées. Si elles peuvent avoir des séquelles de leur traumatisme crânien, c’est même mieux, et qu’elles soient violées par un médecin lubrique, ce serait parfait.
Lire ça pour que tu puisses te dire que si t’avais eu une vie similaire, ça t’aurait collé une putain de bonne raison de t’automutiler l’existence, donné une raison d’être à la boule au ventre. Alors tu demandes du témoignage voyeuriste pour t’identifier un peu. Te dire que l’homme blessé, juste là, c’est un peu toi. Juste pour t’implanter la violence au-dedans et chialer par procuration.
T’as jamais voulu d’une vie plus belle, t’as même jamais cru à l’amour. T’as réussi à te convaincre qu’il fallait baiser beaucoup pour gommer la tête et les cris à l’intérieur, même baiser mal, tant qu’on transpire assez sur la peau de l’autre pour purger un peu. Te glisser dans les lits des autres pour oublier l’odeur de tes cauchemars.
Tu lis pour exorciser, chéri, et tu demandes que je t’invente des mondes où tu pourrais hurler à pleine rage les absences qui t’habitent sans choquer personne. Tu voudrais que je me foute le bonheur contre un mur avec toi, que je me flingue l’espoir et l’utopie. Elles te font peur, mes illusions, et toutes les poches que j’en ai remplies pour maintenir l’équilibre.
Alors je te noircis des pages entières de drames urbains, je t’écris le trottoir et le sang dessus, les immeubles contre lesquels on se plaque pour se coller des coups de reins désespérés, et la tête du gamin quand le père ne frappe plus. Je m’abîme l’innocence à faire la manche sur des pavés détrempés, juste pour le soulagement dans ton regard. Quitte à me faire sauter la carcasse en convulsion contre ton canon de mal être.
Tu pourras pleurer, comme ça.
Je file dans ma chambre. Chambre trop pleine. Chambre trop vide. Je ne compte plus les nuits blanches à venir, à trimer, à me ronger les sangs, à te déguster tendrement. Chambre cage de mes rêves en barreaux dorés, qui me protège de blessures certaines de mes fantasmes trop violents. Je file dans ma chambre, j’écris, j’allonge sur le papier les corps innocents de mes victimes pornographiques. Porte scellée sur mon intime imaginaire, fenêtre ouverte sur les possibles, et le chat qui dort sur le lit.
J’attends de heurter la vie de plein fouet, je m’y prépare. Chambre monastique à la quête d’un idéal. Je rêve parfois de la chambre d’enfant qui m’a vue croître, mais elle n’est plus. Je rêve souvent de la chambre de couple qui m’a vue changer du tout au tout en une nuit à peine.
Mais. Ma chambre de princesse tendre sauvage, cet ego différent de celui qui est. Je m’écris fille du vent, je me dessine sans contraintes. Ce moi que je désire, dans une chambre différente chaque jour, murs d’air, pensées d’eau. Limpide.
Je file dans ma chambre chargée des mots d’émotions, et je continue d’imploser.
Apprends moi à écrire.
J’ai dit d’accord, j’avais pas mesuré les conséquences.
Tu m’aurais dit apprends moi à aimer, ça aurait été plus simple. Juste un peu de technique, deux ou trois conseils et quelques coups de reins. J’aurais pu faire semblant et te faire croire que.
Mais là, aucune échappatoire.
Je n’avais pas pensé qu’il me faudrait jouer franc jeu, carte sur table. Faire all in des émotions pour te montrer les stratégies verbales.
J’ai commencé par lire. Rentrer dans ta tête et essayer de comprendre. J’ai dansé pieds nus sur tes hésitations, sur tes certitudes. C’était chouette et c’était frais, ces univers qui existent en toi.
Mais ça ne t’a pas suffit. Il fallu que tu demandes à voir comment moi je faisais. Il a fallu que je vomisse le mal être devant toi. Que tu voies comme c’est moche à voir. Alors j’ai brûlé le papier de mes sales mots, ceux qui n’ont pas de sens, qui ne méritent pas d’être lus. J’ai écrit, vite, pour avoir l’impression que tu ne lirais pas.
J’ai vidé mes tripes en même temps que l’encre du stylo, et il y avait un peu de toi dedans. Un peu beaucoup. J’ai essayé de te cacher sous des jolis mots, comme je pouvais, ça n’a pas fonctionné.
J’ai rougi, je crois, quand tu as lu.
Je n’avais pas mesuré qu’accepter, ce serait t’aider à devenir impudique.