J'suis tétanisée, chéri, tu sais. J'ai beau mettre la musique aussi fort que je peux, ça me fait pas oublier la foutue impression lancinante que mes mains vont saigner. J'ai peur de la glace par terre et au bout de mes doigts. Tu pourrais me déchirer la peau, si tu voulais, je ne sentirais rien. Je le sens, le froid qui me court dans les veines, il s’insinue, s’imprime dans chacun de mes battements de cœur. Je ne grelotte même plus, mon amour, faut pas gâcher l’immobilité, pas foutre en l’air le moment où tu me tendras ton corps brûlant. Tu serais mon héros et moi je serais ta reine de glace.

Me laisse pas prostrée, pas comme ça. J’ai les os comme des crochets, ils me transpercent et je m’y accroche comme je peux. Je m’enivre des vapeurs chaudes d’haleine que j’exhale, en volutes blanches et épaisses. Je me vautre dedans, m’en frictionner les joues, m’en barbouiller les paumes, je souffle le plus longtemps possible pour ne plus sentir la brûlure à mes poumons. Tu sais comme ça mord, le gel ? Comme ça laisse glisser ses dents acérées sur chaque parcelle de chair à nue, sans aucun répit pour la vie qui palpite et qui panique en dessous ?

J’ai mal, tu comprends, roulée en boule comme ça, contre les papiers satinés des fêtes de fin d’années. C’est beau mais ça réchauffe pas, pas plus que les alcools qu’on boit pour oublier.

Emmène moi, s’il te plait, emmène moi loin. Colle toi contre moi et expire moi ta chaleur. Tu me rendrais la vie, tu vois, ça serait fête et feu de joie, et chacun de mes muscles t’embrasserais de dévotion.